L'Enchanteur, c'est Merlin, lui qui apparaît tour à tour comme un jeune homme ou comme un aïeul à ceux qui le regardent, lui qui maîtrise la magie comme personne et qui, au-dessus des intrigues de la cour et du présent, se consacre à la lutte millénaire du bien qu'il représente comme le mal. Merlin, c'est lui le conseiller, le mentor et l'ami d'Arthur, le plus grand roi de Bretagne qui gouverne son royaume à l'aide des Chevaliers de la Table Ronde, et les enverra à la recherche du Graal...
J'ai au départ été très hermétique à ce roman. Je ne comprenais tout simplement pas les choix de l'écrivain: des procédés narratifs étonnants, des ellipses, des chapitres très courts, des passages survolés et d'autres très approfondis... Et puis j'ai repensé à la dédicace de Barjavel au début du livre, dans laquelle il dédiait ses écrits aux conteurs et aux troubadours du temps passés en "les priant de l'accueillir parmi eux". J'ai alors compris que l'auteur avait choisi de raconter cette histoire en se mettant dans la peau d'un ménestrel. A partir de ce moment-là, j'ai adoré cette démarche et j'ai trouvé ce roman brillant. Si je n'ai pas aimé les quelques libertés prises par l'écrivain par rapport à la version la plus populaire de la légende, j'ai eu un coup de foudre pour des phrases, des passages, et l'un particulièrement, m'a semblé merveilleux: je n'ai clairement jamais lu une telle évocation, si réussie, de l'amour entre Guenièvre et Lancelot. Il m'arrive, quelquefois, quand je lis un livre, d'avoir à le reposer quelques instants sur le côté pour, stupéfaite et soufflée, réfléchir à la phrase que je viens de voir. Ç'a été de nombreuses fois le cas dans celui-ci, et c'est pourquoi je lui décerne sans un soupçon d'hésitation le titre de coup cœur.